The Bridge, un pont jamais trop loin

The Bridge et Zutique posent un nouvel ensemble d’improvisateurs à Dijon, près des cuves à bières de Un Singe en Hiver. Concert jeudi 1er juillet à 20h30, on livre ici quelques notions-clefs pour se perdre convenablement dans cette musique.

Jef Gilson à Madagscar

The Bridge #2.5 (ici avec Sophie Agnel) festival Bruisme / Jazz à Poitiers, juin 2021 © Alexia Toussaint

C’est quoi la combine ?
The Bridge, c’est un réseau transatlantique créé en 2013. Toujours bon de savoir faire le pont. Et The Bridge s’y entend à merveille quand il s’agit de mettre en lien des musiciens et des musiciennes de France et de la scène de Chicago. The Bridge s’appuie aussi sur un réseau de scènes, de festivals comme Zutique ou Bruisme, et de clubs où le jazz très libre et les musiques improvisées s’inventent sur l’instant, souvent. Chacun de ces allers-retours très classes crée des ensembles franco-américains et des tournées en France et aux USA.

C’est bien ce passe-passe ?
Oui, c’est même très bien. Ça joue avec le hasard et la fragilité des rencontres et des rapports humains. Chaque ensemble réuni par The Bridge remet en jeu l’idée même de l’improvisation. Ça ne se dansera pas forcément mais c’est toujours fascinant à voir, la musique quand elle est créée sur place et devant vous. Un peu comme au self mais avec le choix du menu. Il suffit de se laisser faire et de se permettre d’entendre comment des improvisateurs font preuve d’écoute, de patience et d’humilité pour créer une musique unique. Au sens philosophique du mot. Pleine d’un seul élément, elle-même. Unique aussi parce que celui ou celle qui y assiste n’entendra pas le même concert que celui ou celle qui écoutera plus tard ou demain. Bref, The Bridge fait partie de ces occasions rares de toucher du doigt cet heureux incident qu’il y a à être au monde. C’est beau, mieux qu’au self.

C’est qui déjà ceux-là ?
Le projet transatlantique réunit 3 têtes pour cette date dijonnaise. Aussi bien faites que bien pleines. Au-dessus des bouillonnements de l’Océan, et sur cette version 2.5, sont assis Ben Lamar Gay, Pascal Niggenkemper et Sam Pluta. Chacun s’affairant à se démultiplier au cours de solos magnifiques, s’affairant à nourrir le commun du quatuor constitué pour l’occasion. Avec ce qui définit un musicien : jouer avec les équilibres instables et provoquer les habitudes établies. Sam Pluta est un as des assauts électroniques et confronte avec le sourire ses machines aux intrus live de ceux avec qui il joue régulièrement, comme Peter Evans par exemple. Pascal Niggenkemper est contrebassiste. A l’aise dans la première mouture du Bedmakers de Robin Fincker comme aux côtés de Joe McPhee, son toucher est posé sur le bois de son instrument mais sonne solide et inoxydable comme de l’acier. Léger et puissant. Ben Lamar Gay reste indéfinissable, forcément. Improvisateur hors pair, cornettiste émouvant, chanteur imparable, il pourrait s’imposer comme le fils des noces entre Stevie Wonder et Ornette Coleman. Pas mal.

Le récap :
The Bridge #2.5
Ben Lamar Gay, Sam Pluta et Pascal Niggenkemper
concert produit par The Bridge
et accueilli par Zutique Productions
jeudi 1er juillet à 20h30
Un Singe en Hiver / Dijon
concert gratuit

La stat : 2.5
Ce set est issu de la deuxième génération de The Bridge. Presque une transition avant la nouvelle mouture des échanges, elle est cependant d’une classe et d’un enthousiasme dingos.

Le dico impro : Tension.
Les improvisateurs apportent ce que le moment leur inspire. Mais aussi ce qui a été joué la veille ou au fil des concerts précédents. Si on considère qu’un musicien est avant tout un être humain. On imagine bien que le menu du jour, que la longueur des trajets de déplacement entrent aussi en jeu. Chacun joue donc avec son expérience, sans forcément être d’accord au préalable. D’où les tensions créées par ce qui est joué. Mais comme il s’agit de jouer ensemble, libre à chaque improvisateur de trouver des solutions pour viser la détente commune. Simple comme la géopolitique.

Le profil du set :
3 hommes et des coups fins. Ces musiciens sont délicats, inventifs et très forts quand il s’agit d’écouter les autres. À prévoir donc une grande réactivité, de longues plages qui peuvent ouvrir les oreilles sur de l’inconnu, du bizarre et donc du plaisir, en fin de set. Aucun penalty à prévoir.

La décla :

« On pourrait imaginer un golem, qui cette fois-ci ne serait pas fait d’argile mais de cuivre, de cordes et de câbles, relayant toutes les informations, toutes les sources, tous les sons. Révélant que toutes les sources sont des ressources, ni plus ni moins, qu’elles soient acoustiques, électriques ou électroniques. »

Alexandre Pierrepont, géniteur heureux du projet The Bridge


Guillaume Malvoisin

(chronique du live et podcast radio
en partenariat avec InBar à retrouver mardi dans ce magazine)

logo Zutique
Logo Un Singe en hiver

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