Une soirée à Be Bop Or Be Dead :
Emma Jean Thackray

Belfort, galerie Cheloudiakoff, samedi 9 novembre 2019.

par | 12 Nov 2019 | concerts

Emma Jean Thackray

Au fond du tympan. On a l’oreille bien marquée, maintenant. London is calling, again. Et dans le maelström jazz briton en cours, certaines têtes prennent le pont d’assaut. Emma Jean Thackray est de celles-ci. Le concert ? Joli cadeau de Be Bop Or Be Dead qui replace Belfort sur la carte du jazz from iourope. La musique ? Du Free Jazz joué en Air Max, aficionado des expés de Madlib et politically utterly aware. Mais Emma Jean Thackray reste loin de se contenter de cuisiner Donald Byrd à la mode Breakbeat. Tout est ultra précis dans ce set garé parmi les œuvres d’art de Cheloudiakoff. Le jeu sur les timbres, soyeux. Les lignes de basse, monstrueuses. On les jurerait sorties d’un modulaire, mais elles pèsent encore davantage au soubassophone de Ben Kelly. Le spoken word, en double teinte. Bourré de tendresse et d’imprécation, de charges politiques aussi, écouter Make Do, pour l’entendre. Enfin, le son bittersweet. Soft, quand il le faut. Durci, sous reverb quand il le faut.
« I want you sweaty. I want your feet aching », entend-on avant que le beanie hipster d’EJT ne lance Ley Lines. La galerie devient, pour une paire de quarts-d’heure, dancefloor. Aérien et bordé de Groove. Acid Jazz dans la forme par la transe qu’il file à votre bassin, Acid House par les clusters qui vous poussent hors de vos shoes. Dougal Taylor, batteur au drumming sous auto-hypnose, à l’œil rivé à chaque rupture décidée à vue par la leadeure du combo, connaît par cœur son Petit Elvin Jones illustré et devise au millimètre avec la trompette d’EJT. Le quartet de se rhabiller de jazz modal, de résurgences électriques très élégantes, d’une voix éthérée, gorgée de ce qu’il faut de Soul humaniste. Les lignes de Rhodes barbotées aux seventies par Lyle Barton sonnent clair poussent encore plus loin l’élégance. Ultra classe, ultra précis. Rien n’est laissé au hasard. Tout semble dédié au plaisir du jeu à plusieurs, en combinant, selon l’humeur, abscisse et ordonnée. À l’anglaise, dans sa juxtaposition de cultures différentes, parfois contradictoires. Juxtaposition de communautés d’esprit et de combats qui adresse un doigt bien raide aux marottes d’assimilation et autres déviances intégrationnistes en vente chez nous autres froggies. Damn well.

English spoken, here.

Right between the ears. We have it strong now. London is calling again. And in the current maelstrom of UK Jazz, some heads have taken the bridge. Emma Jean Thackray’s is one of these. Her music? Free Jazz played in Air Max, aficionado of Madlib’s experiences and politically utterly aware. But Emma Jean Thackray is far from being satisfied with cooking Donald Byrd in the Breakbeat jar. Everything is ultra clear in this set parked among Cheloudiakoff’s pieces of art. The toneplay, silky. The bass lines, exquisite. They seems have been played on modular, but they weigh even better on Ben Kelly’s sousaphone. The spoken word, halftone. Filled with tenderness and political charges. Listen to Make Do, you’ll hear it. Finally, you’ll hear the bittersweet sound. Soft, when necessary. Tightened with reverb when necessary.
“I want you sweaty. I want your feet aching”, was heared before the EJT’s beanie launched Ley Lines. The gallery becomes, for a few minutes, a dancefloor. Airy and lined with Groove. You’ll find chunks of Acid jazz and trance that grabs your hips, lumps of acid House and clusters that push you out of your shoes. Dougal Taylor, drummer under self-hypnosis, with his eye nailed to each break decided by the combo’s leader, knows by heart his Elvin Jones’ illustrated Precis and motto to the millimeter with EJT’s brass bell. So the quartet can dresse up in modal jazz, with very elegant electric resurgences, with a voice that stuffing itself with what it takes for humanist Soul. The Rhodes lines snatched in the seventies by Lyle Barton sound clear. Ultra classy, ultra neat. Nothing is left to chance. Everything seems to be dedicated to the pleasure of playing with others, combining the x and y-axes. English style, here. In its juxtaposition of different, sometimes contradictory cultures. Juxtaposition of communities of mind and struggles that addresses a very stiff finger to the assimilation obsessions that we see rising in France. Damn well.


Guillaume Malvoisin
photo © DR

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