Line-up
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Zoe Heselton — voice, electric guitar
Inès Rousset — voice, bass
Merve Salgar — tanbur
Liliane Chansard — voice
Lise Barkas — hurdy-gurdy
Quentyn Risjeterre — cowbells
Harutaka Mochizuki — saxophone
Zoe Heselton ne chante pas pour épater. Sa voix, grave et posée, vient de loin. Pas d’effets, pas d’enjolivures : une parole chantée, chargée, traversée. Il y a de la fatigue dedans, du feu aussi. Et de suite, ça crée un espace. Pas spectaculaire, mais sincère. Une sorte d’abri. Another Kind Of Suicide n’a rien de solitaire. C’est un travail collectif, tissé serré. Inès Rousset, à la basse et aux voix, fait le lien. Son jeu est souple, fin, jamais là pour se montrer, toujours pour servir le morceau. Le tanbur de Merve Salgar ajoute une tension nouvelle, une vibration qui trouble la ligne. Lise Barkas, avec sa vielle à roue, apporte des textures rugueuses, quasi-industrielles, loin du folklore. Et puis le saxophone de Harutaka Mochizuki surgit parfois comme une pensée qui fend l’air. Peu de notes, mais toujours au bon endroit. Les morceaux s’enchaînent sans chercher la démonstration. Salt Water Ritual installe l’ambiance : basse rampante, voix en cercles, atmosphère suspendue. Day By Day est plus lumineux, mais garde cette douceur tendue, comme une journée qu’on traverse en apnée. What I Am Doing Here? flotte entre deux états, avec le tanbur qui étire le temps. La chanson-titre, Another Kind Of Suicide, ne dure pas longtemps, mais dit beaucoup. Elle serre sans crier, et laisse un vide très précis après elle. Plus loin, Maybe It Is 3 AM déplie une fatigue familière. Pas celle qui plombe, mais celle qui fait voir flou. La vielle à roue y grince doucement, presque comme une alarme intérieure. A Game Of Chess s’installe comme un paysage mental : aucun couplet, aucun refrain, juste des mouvements calmes, une tension retenue. It’s Only Rain revient à quelque chose de dépouillé : guitare discrète, voix nue, quelques mots qui tombent juste. Breath By Breath est l’un des sommets du disque. Long morceau lent, presque méditatif, qui respire comme son nom l’indique. Le sax y glisse entre les silences, le temps s’étire, et tout tient. Le dernier titre, Changes, ferme l’album sans ponctuation nette. Rien ne se résout, mais quelque chose a bougé.Le son est sobre, naturel. Le son est sobre, naturel. Zoe Heselton, qui signe aussi le mixage, laisse aux instruments la place de sonner comme ils sont, sans tricher. Les voix ne sont pas polies, les souffles restent. Et même les cloches de vaches de Quentyn Risjeterre, a priori incongrues, trouvent leur rôle : un battement brut, qui ramène au sol. En parfait cousin sonore du 4.48 Psychose de Sarah Kane, Another Kind Of Suicide ne cherche pas à captiver. Il prend son temps, avance par frictions, sature parfois, puis se retire. Ce disque refuse les raccourcis, mais sait exactement où il va.