Weather Report, seigneurs météo

Le Mot et le Reste ressort le livre que Christophe Delbrouck à consacré à l’aventure du Weather Report. Joe Zawinul, Wayne Shorter, Jaco Pastorius sont dans un bateau. Un trrrrrrès looooong paquebot. Revue d’histoire.

par | 15 Juin 2022 | Livres

Weather Report

Weather Report © Sam Emerson, 1985

1976. Le Black Market est tout juste ouvert depuis 15 secondes que la basse déboule, ronde, ouverte et lancinante. Black Market ? Ce marché de duperies géniales s’active sur le septième disque de Weather Report. Soit le mitan exact de la discographie du groupe créé en 1971. La basse qui ouvre Black Market, c’est celle d’un petit jeunot recruté par les tauliers-fondateurs, Joe Zawinul et Wayne Shorter. Jaco Pastorius, basse-hero comme d’autre sont guitar-hero, lancera le groupe-monde définitivement sur les terres tantôt décriées, tantôt admirées du jazz-fusion.
On n’ouvrira pas le débat ici. On parlera plutôt de 2007. 21 ans après la sortie du der des der du Weather Report, Christophe Delbrouck, exégète de Santana, Zappa et sans doute d’autres fétiches en ‘a’, signe une somme sur la trajectoire du combo new yorkais. 15 ans, encore plus tard, Le Mot et le Reste réédite le livre et ré-illumine cette trajectoire faite d’arrangements, de souple, d’électricité, de suraigus et d’une lucidité musicale à toute épreuve.
Ce livre est tissé de patience et de précisions. Résultat, c’est une somme. Une somme pour qui a envie de se glisser dans une des aventures les plus abouties de l’histoire de jazz. Des fourches caudines de l’empereur Miles, jusqu’à la séparation du groupe après avoir exploré en long, en large, en 14 disques et de travers comment fusionner tout ce que l’époque avait su compter comme innovations. Les arrivées et les départs sont comptabilisés avec une vivacité réjouissante et le livre de Delbrouck n’est pas du genre avare en citations patiemment reconnectées avec leur contexte. Parfait comment Wayne Shorter décrit le « swing branché » page 135, très bons les doutes émis par Zawinul, page 279, à propos d’Herbie Hancock fourageant tous azimuts voire « hors du jazz » avec son V.S.O.P.
Pas de rancœur ténue ni tenace cependant, la couleur d’ensemble est celle laissée par un auteur-admirateur-chercheur. Tout est mis sous une lumière crue mais valorisé par de très futés clairs-obscurs. Christophe Delbrouck, dans ce Weather Report, une histoire du jazz électrique, fait exactement ce qu’il a à faire. Transmettre. Et éclairer. À la lampe à sodium, au faisceau tungstène, au néon parfois. Et sa passion, ainsi révélée, peut facilement devenir l’affaire de tous. Dispo bien au-delà de tout marché noir.

Weather Report Une Histoire du Jazz électrique de Christophe Delbrouck

— Weather Report (Le Mot et le Reste, rééd. juin 2022)

Black Market

par Weather Report | Black Market (1976)

« Tout est mis sous une lumière crue mais valorisé par de très futés clairs-obscurs.  »


Guillaume Malvoisin

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