Quiet Men

Pablo Cueco : zarb · Simon Drappier : arpeggione
Denis Colin : clarinette basse, clarinette contre-alto
Julien Omé : guitare

Interview. Rencontre à Saint-Claude, mars 2022
La fraternelle – Maison du Peuple.

Quiet Men

Quiet Men en concert à la Fraternelle © LeBloc

D’où ça vient, Quiet Men ?

Simon Drappier : De nos rencontres, dans un bistrot que fréquente Julien, le « Quiet Man ». C’était un petit clin d’œil.

Denis Colin : Le « quiet », c’est ce qui permet l’émergence, c’est l’ouverture, l’empire sur soi. Pour que l’émergence puisse avoir lieu, il faut être un peu « quiet ». J’aime cette idée de puissance dans cette tranquillité. C’est le fait de laisser venir, de savoir laisser venir ses émotions, et d’avoir un dialogue. Tout ça est au cœur de notre construction musicale.

 

Comment s’est passée votre rencontre musicale ?

SD : C’est Pablo qui nous a réunis. J’ai joué avec lui dans d’autres groupes pendant quelques années. Denis et Pablo ont joué ensemble pendant 18 ans. Il se trouve que Julien et Pablo ont commencé à travailler ensemble peu après. L’un commençait, tandis que l’autre s’arrêtait [rires]. À son invitation, nous nous sommes réunis un soir pour jouer, sans plus de contraintes. Et ç’a tout de suite marché.

 

Pour décrire votre musique, vous évoquez le psychédélique folk jazz.

SD : D’abord « jazz », par notre formation et notre traitement du matériau sonore, ensuite « folk » dans notre rapport au son. Nous n’avons ni batterie, ni basse, ni piano, mais nous avons une guitare qui est très présente. Il y a presque quelque chose de la veillée. Enfin, « psychédélique », pour l’importance du collectif et de la transe.

 

Que voudriez-vous transmettre avec votre musique ?

DC : Avant tout, la possibilité d’exister ensemble et de construire quelque chose dans l’instant.

SD : Au fur et à mesure des concerts, le plus intéressant survient quand on a tous les éléments pour aller ailleurs que là où devait nous mener la partition. Le plus beau, c’est de saisir ces nouveautés qui nous tombent dessus. Et si on arrive à les choper tous les quatre, le public les entend aussi.

 

Quel est votre processus de composition, puis d’improvisation ?

DC : Il manque une étape. D’abord, la composition, c’est chacun pour soi, chacun chez soi. Mais la deuxième étape, c’est l’atelier : la composition est arrangée et à quatre, ça peut être très long parce que le groupe est dans un son inédit. Trouver l’équilibre, ça peut prendre du temps. Donc on produit lentement, mais ça nous permet d’aller loin.

 

Dans votre formation, on trouve au moins trois instruments atypiques : l’arpeggione, le zarb et la clarinette contre-alto.

DC : Je suis venu à la musique par le free jazz auquel j’ai consacré mes dix premières années avec les musiciens américains qui étaient à Paris. Après cette expérience, j’ai cherché à trouver un son qui ne soit pas forcément issu du jazz, car cette musique est d’abord marquée par ses deux instruments rois, le saxophone et la trompette. J’ai pu le faire avec la clarinette basse. Puis, parce que je faisais de la musique de film, je me suis procuré une clarinette contre-alto. C’est un instrument avec de belles basses et un potentiel narratif incroyable. On était tous d’accord pour la garder dans le groupe.

SD : Moi, je vois ça comme une extension à la relation que j’ai avec l’aperggione. C’est un instrument très rare. Dans cette formation, nous n’avons pas le poids d’une tradition derrière nous, du moins, d’une tradition subie. On peut facilement s’éloigner des clichés.

DC : Nous sommes inégaux dans le groupe. Julien joue de la guitare, c’est-à-dire pratiquement l’instrument le plus joué au monde. Il sait que , dès qu’il va quelque part, ça le catalogue dans un style. À l’opposé, si je prends la clarinette contre-alto, il y a zéro répertoire. L’arpeggione, il y a peu de références. Quant au zarb, il est davantage marqué par la musique traditionnelle iranienne et par l’écriture de la musique contemporaine occidentale, bien que Pablo ait développé aussi son propre jeu. Donc, nous avons un groupe de trois instruments avec un petit répertoire, et la guitare, qui a un monde de répertoire. Julien donne la clé d’accessibilité au son du groupe à la guitare. Nous autres, avec nos sons originaux, cherchons à sonner évidents.

Quiet Men
Quiet Men

— photos © LeBloc (2022)


Propos recueillis par Lucas Le Texier à La Fraternelle de Saint-Claude, le 26 mars 2022.

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