« Comme dans tout poème parfait, il y a un mystère insoluble. Ici, il repose dans la tessiture des deux instruments, à peine une sixte les sépare, suffisamment proche pour perdre l’oreille. »

yoqal
kamilya jubran
& sarah murcia
— chronique

jazzdor series (décembre 2024)

Kamilya Jubran oud, chant
Sarah Murcia contrebasse

Au cœur du morceau titre de ce disque, se cache, peut-être, le nerf de sa guerre. « Tu n’es pas à moi, ma beauté sidérante », Kamilya Jubran, parole ponctuée du Oud et des pilons basses de Sarah Murcia. YOQAL, est un disque qui échappe à celui qui écoute. Sidérant, absolument. Dans cette juxtaposition de cultures musicales et de géopolitiques différentes. Dans la jonction de deux musiciennes amies, dont l’obstination et l’empathie ne sont pas les moindres défauts. Dès les premières mesures percussives de BAAB jusqu’à la charpente enragée de RAML. Mais, comme dans tout poème parfait, il y a un mystère insoluble. Ici, il repose dans la tessiture des deux instruments, à peine une sixte les sépare, suffisamment proche pour perdre l’oreille. Là, le mystère tient à la syllabe, scandée, répétée pour être malaxée puis allongée  voire pitchée jusqu’à se faire son brut, uniquement. Incandescent, furieusement habité. Trop cursif pour être dompté, trop malin, pour se faire prendre dans les entrelacs complexes de la musique qui le soutient. Le mot, dans YOQAL, est un pivot. Un axe solide et connu des deux instrumentistes. Versant pop pour Jubran, versant drama pour Murcia (jusqu’à ce terrain d’exploration reedien qu’est le récent Transformé). On ne fera pas mieux pour ce diamant brut que : la beauté sidérante qui échappe à l’entendement. Mais, si ce disque ne laisse pas voir ses énigmes dans leur résolution, sa haute sensibilité dynamite et recompose des images et des questions. À chacun·e de se débrouiller avec sa propre psyché pour en démêler codes et réponses. La dynamique du duo les aura planqués dans un disque exaltant à écouter debout et les yeux grands ouverts.

texte de guillaume malvoisin

Yoqal