Sensual Kitsch
PointBreak a joué l’entremetteur entre le jazz et des millenials qui, a priori s’en contrecarrent. C’est marrant, les tracks qui émergent des descentes dans SpotiTube, You-Fy et autre AlgoFlash : pépites voluptueuses ou clinquantes comme une vitrine Gucci. Sweetest Taboo. C’est biaisé mais c’est valable. C’est kitsch mais c’est sensible. Bref, c’est Jazznoob. Huitième des témoignages-vérité.
— The Simpsons © Matt Groening
Le petit jazz qui se joue en fond, dans l’appartement new yorkais d’une trentenaire allongée dans son bain, sirotant son verre de vin rouge parce qu’elle supporte plus la vie avec son vieux mari absent. Pour moi, c’était ça le jazz. Ni plus ni moins, une histoire bien clichée, un genre réservé aux américaines riches, en gros. Maintenant qu’on a mis les bases, je peux commencer la petite expérience. Bon. Let’s go! On va essayer de dégommer l’algorithme de Spotify et de sortir des petites pépites. Bien évidemment, le but c’est pas de trouver des sons de jazz que tout le monde connaît. Nina Simone, James Brown, Ray Charles et les autres cocos, c’est vu et revu, allons dans l’original, un peu. Pour déterrer des trésors musicaux, j’ai trouvé une petite playlist titrée “apéro jazz&cool lounge”, un truc bien original et que personne n’attend, un truc qui me correspond bien, quoi. C’est bon ? On lance l’aléatoire.
Pink Martini, full casual
On commence par la belle Sade avec son magnifique son Smooth Operator, classique, sensuel et smooth. Le jazz que j’affectionne tout particulièrement. La deep voice de Sade m’emmène dans un voyage de 4 min 16 et ça donne envie de se déhancher sensuellement sur le son du saxophone avec une coupe de champagne à la main habillée de la robe que porte la divine Michel Pfeiffer dans Scarface. Tu as l’image ? La séance continue avec Otis Redding et (Sittin’ On) the Dock of Bay. Un vrai soulman, une voix douce et puissante, petite musique d’ambiance à écouter le soir avec comme seule lumière celle de la flamme d’une bougie. On accélère la cadence avec un son totalement différent, Over the Rainbow par Melody Gardot, musique très douce qu’on écoute pour rêver. Tu connais la version de Izzy et son Ukulélé ? Bah c’est pas lui qui l’a écrit ni Melody Gardot, d’ailleurs. Judy Garland dans Le Magicien d’Oz, c’est l’interprète qui la chante pour la première fois. Avoue, je t’ai appris un truc.
Maintenant, je t’emmène dans quelque chose de plus classique : Bert Kaempfert avec Strangers in the Night. Laisse-toi emporter par la douce vibe, ferme les yeux et tu es dans un monde imaginaire, et, quand vient le son de la trompette, imagine-toi te balader dans les rues de New York. And now, on se réveille de notre petit rêve et on continue dans un son très doux, oui encore. C’est Pink Martini et Tea for Two à écouter un soir d’hiver clair, une cigarette à la main — ok, pas obligé si tu fumes pas mais restons dans le cliché — et regardant les lumières de la ville. Et encore une fois, on laisse son corps se laisser emporter par la voix de la chanteuse de Pink Martini et celle de Jimmy Scott. Honnêtement, 5 min de eargasm (orgasme pour les oreilles, si t’as pas compris).
— Smooth Operator par Sade (1984)
Melody Gardot.
Otis Redding
Doris Day
Norah Jones
Là, je peux pas résister. Je vois Doris Day. De base, pour moi, c’était une actrice donc à aucun moment j’aurais pu savoir qu’elle était en plus une chanteuse. Du coup, je clique et sa chanson I’ll Never Stop Loving you se lance. L’impression de retourner en enfance quand je regardais des films en noirs et blancs romantiques avec mes parents. Cette fois-ci, on retourne dans nos petits rêves et on s’imagine une petite vie dans laquelle on se retrouve dans un grand appartement bien vintage, comme je l’ai déjà dit, tu commences à comprendre le mood dans lequel je suis, on prend un petit verre de rosé pour accompagner tout ça — oui, oui, tu le sais déjà, l’abus d’alcool est dangereux pour la santé. Les deux dernières, ce sera deux petits kiffs perso et deux petits bonus pour toi. D’abord, on commence avec la merveilleuse et talentueuse Nancy Wilson (encore une femme, oui je sais, mais on en parle pas assez) avec son merveilleux morceaux, très romantique, Save Your Love For Me. Là, on est dans un mood très soft où on imagine Nancy Wilson chanter aux abords d’un piano à queue tout en regardant droit dans les yeux le pianiste ou la pianiste — oui, on se laisse rêver. Toujours dans l’imagination pure parce qu’on en a besoin dans cette période où on voit personne, n’est-ce pas ? Là, on ferme les yeux encore une fois, on laisse les lumières de la ville éclairer notre appartement et on s’imagine dans une salle de concert des années 70, pas de masques, beaucoup de monde, bien-sûr, et juste la voix de Nancy Wilson pour s’imaginer un temps où les seuls problèmes qu’on avait c’était de savoir si on allait au bar ou pas après le concert. Pour le dernier, là, on se lâche et on donne de la lumière à une artiste sensationnelle : Norah Jones avec son Come Away With Me. On est d’accord, ce son est très américain ? Les petites notes qui nous font penser à la célèbre country kitsch du Texas, l’impression de se retrouver dans le film Into the Wild. Oui, on reste dans le cliché, j’aime beaucoup les clichés. Mais, passons, la voix soul de Norah Jones donne envie de se poser et de l’écouter toute la matinée. D’ailleurs, bonne chanson pour un réveil tout en douceur, je te le conseille vivement.
Bon, ok. J’avoue qu’au début j’ai un peu mytho. Je m’y connais quand même un minimum sur le jazz. Le cliché au tout début me fait très rire personnellement. Cette petite expérience ne m’aura pas fait changer d’avis mais j’espère que t’as pu découvrir de nouvelles voix et que tu pourras les ajouter dans ta playlist. D’ailleurs, je sais pas si t’as remarqué mais le jazz, comme la musique en général, c’est une vibe. Toutes les musiques que je viens de te faire découvrir peuvent parfaitement convenir à pleins de moments de ta vie du “je me prépare avant un date” à “j’ai envie de voyager” ou encore “j’ai vraiment envie de pleurer ce soir”.
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Ellinor Bogdanovic
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— Save Your Love For Me par Nancy Wilson (1961)
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