Riot Grrrl, rebelle rebelle
Des structures dijonnaises*, dont LeBloc, étaient réunies lundi 10 octobre pour plancher sur le sujet de l’égalité femme-homme au sein des musiques actuelles. Avant d’aborder des solutions concrètes, Mathilde est venue présenter le mouvement des Riot Grrrl dont on a déjà parlé dans le mag. Des femmes qui ont fait fermer le clapet aux mecs en passant la deuxième pour exister sur la scène punk. C’était aux Etats-Unis dans les années 90. Et forcément, ça donne des idées.
Dès les années 70, la culture du Do it yourself prend de l’ampleur aux States. Le but ? Populariser la pratique de la musique chez des gens qui n’en font pas. Le DIY encourage des femmes à saisir des instruments et de tenter. C’est comme ça que les groupes anglais The Slits ou X-Ray Spex se forment, s’en mêlent et démontent les clichés sur les femmes dans la musique et donnent l’exemple aux ricaines. Ici, pas de place au sexy-glam. Place à la boue, au punk et à la rage. Elles dénoncent et n’en ont rien à foutre. Ciao l’image de la petite fille bien sage.
« Elles appellent d’autres femmes à se réunir et réfléchir à enclencher une révolution féministe sur fond de punk. »
C’est tout ça qui va motiver dans les années 90, d’autres femmes à investir la scène punk. Parmi elles, il y a Kathleen Hanna, Billy Karren, Tobi Vail, et Kathi Wilcox. Ensemble elles forment le groupe Bikini Kill dans la ville d’Olympia. Le blaze annonce la couleur, les filles sont déterminées et ne rigolent pas. Elles ont en plus un zine qu’elles distribuent dans leurs concerts bien vénères dans lequel elles continuent la lutte. Leur tube signature Rebel Girl donne le ton. Être rebelle devient cool, classe. Ça donne des idées à Allison Wolfe et Molly Neuman qui elles aussi sont des meufs rebelles. Elles calquent le modèle Bikini Kill, développent en premier un zine qui défonce les stéréotypes de genre et créent en un mois leur groupe, Bratmobile, sur un malentendu. Ces femmes créent leur propre définition du cool, tout en crachant sur le sexisme, le racisme ou encore les violences domestiques. GANG !
Bikini Kill et Bratmobile se retrouvent pour un concert à Washington dans un contexte particulier. Elles découvrent une ville encore plus politisée qu’Olympia et qui est beaucoup mieux organisée. Mais elles arrivent surtout alors que des émeutes raciales éclatent en ville. Elles prennent exemple et veulent leur propre émeute, Riot Grrrl. Elles appellent d’autres femmes à se réunir et réfléchir à enclencher une révolution féministe sur fond de punk. Beaucoup d’ados rejoindrons le mouvement. Au programme de cette riot : conférences, ateliers d’écriture et de technique, des concerts et des zines, bien-sûr. Elles appliquent des tarifs préférentiels en fonction des codes que les spectateurs adoptent à leurs soirées. 3$ pour les femmes, 3$ pour les hommes qui mettent des jupes, 4$ pour les hommes qui gardent leurs sapes virils. Une bonne manière de montrer aux machistes qu’ils ne sont pas les bienvenus.
Ce mouvement punk féministe radical perd un peu de son souffle peu à peu. Des journalistes s’incrustent dans leurs réunions, les décrédibilisent dans les média en racontant leurs récits intimes et les qualifient d’une bande de meuf hystériques. Le mouvement est aussi jugé par des femmes racisées comme porteur d’une seule parole : celles des femmes blanches et de classe moyenne. Peu inclusif donc.
Aujourd’hui encore, la route est encore longue pour obtenir l’égalité dans nos salles de concerts. Que ce soit dans la programmation, dans la technique, ou dans le public. Le mouvement musical des Riot Grrrl dans les années 90 a laissé des traces sur son passage. Aux Etats-Unis et en Angleterre, certaines femmes continuent dans cette lignée. Le mouvement n’a pas eu le même impact en France mais pour autant des revendications similaires résonnent partout encore. Revolution Girls Style Now !
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Florentine Colliat
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* avec les structures Péniche Cancale, La Vapeur, LeBloc, Radio Campus,
Un Singe en Hiver, Bruit Marron, Sparse, Les Lentillères et les Tanneries
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