MC Hammer, marteau sans maître
Du jazz, à bien écouter, on pourrait en trouver partout. Y compris à certains rayons des supermarchés, dans les ascenseurs ou dans les halls d’accueil. Ça aide à vendre, le jazz, ça aide à passer le temps ou à raconter de jolies histoires idéales pleines de grands sentiments. D’ailleurs, pour cela, on a même inventé un mot : jazzy. Cette rubrique réveille les trompettes et donne l’alarme. C’est l’Alerte Jazzy. Troisième sonnerie avec un tube qui pimpe la Motown et Herbie Hancock. U Can’t Touch This. Ok, pas touche.
High Five Haribo © DR.
Lourd. Le marteau de MC Hammer s’est abattu sur la baie de Frisco et la scène rap d’Oakland. Prod efficace, bizness plan à chaque rhime, féroce aptitude à faire le show. Au cœur de la bad réputation de la Bay Area, le rappeur se la joue double-face, beau gosse chrétien versus caillera yuppie. Pour unir les deux facettes, un son. Lourd, égotripé, tape à l’œil. Emcee Marteau est un petit malin. Son U Can’t Touch This va rafraîchir un tube Motown avec le son Herbie Hancock.
U Can't Touch This
Bizness Classe © DR
Enfant, Stanley Kirk Burrell rejoint l’équipe des Oakland A’s, tente de devenir joueur mais tape un strikeout. Pour sa reconversion, Burrel hésite. On le sait depuis cette année, la vente de drogue c’est mal, alors le jeune Kirk tente de devenir captain et s’engage in the Navy. 3 ans plus tard, c’est le milieu des années 80. Passant d’un uniforme à l’autre, Stanley monte les Holy Ghost Boys, un combo de christian rap. Puis incapable de se contenter de ne faire que du rap, il plonge dans la trajectoire qui le consacrera King du pop-rap, repeignant des hits en couleur platine. Trajectoire en trois temps. Pas rancunier, il emprunte d’abord à quelques joueurs des Oakland A’s de quoi monter son label. Il devient boss de Bust It On. Ensuite, Stanley Kirk Burrell arrête de se laver la bouche au savon, se renomme MC Hammer et se fait connaitre pour ses facilités langagières. Hammer balance à la pelle ses diss tracks, petits morceaux dont le seul but est de vanner sévère un rappeur concurrent. Troisième étape sur la route de la consécration : le doigt mouillé. Hammer sent le vent venir. « Les gens veulent du rap avec quelque chose de plus que le rap. » Boum. Hammer walks like an Egyptian, se fait coudre des parachutes pants et parfait ce qu’il réussit de mieux. La reprise, le remake glam, le golden pimp en règle. Exemple en or, U Can’t Touch This.
Parachute doré.
« Give me a song or rhythm / Makin’ ’em sweat, that’s what I’m givin’ ‘em / Now, they know / You talkin’ about the Hammer, you talkin’ about a show »
à gauche : U Can Touch This (1990), la Hammerdance.
La song remise sur le métier, c’est Super Freak de Rick James, petit faiseur de la grande maison Motown. Producteur visionnaire, fabriquant de sulfures groovies, James finira comme adepte au crack. Mais avant cela, c’est 1981, le crack c’est lui et Super Freak, pépite de funk jazzy, sort sur l’album Garden Of Love, Street Songs. Album qui règle son compte aux USA pilotés par Reagan. Ce freak, très chic, marque son temps et au-delà. Jay-Z le sample sur Kingdom Come, Batman et Suicide Squad l’enrôlent dans leur OST. Et MC Hammer le pilonne et le martèle en 1990 pour en faire un tube dans le tube. Mise en abyme version Street. Ça sort sur l’album Please Hammer, Don’t Hurt Them qui va imposer ses danses diagonales aux kids de l’époque. La HammerDance remplace les imprécations politiques. Les lyrics sont à la Gloire du emcee omnipotent, dont les pantalons sont gonflés comme des parachutes. Dorés, forcément.
À l’atterrissage, Hammer laisse pas mal de sa crédibilité. Trop vendeur, trop populaire, un peu fake. C’est l’époque où le rap se normalise. Herbie Hancock avait posé les bases avec Rock It, le hip hop avait marché dans la combine. Le synthétique faisait des merveilles. Avec U Can’t Touch This, le synthétique se contente de briller. Efficace, une fois de plus. Album au top des hit parade pendant 5 mois, disque de platine, phagocyté par la com’ de PepsiCo. Tu peux pas test, U Can’t Touch This. Enfin pour le moment. 2 ans plus tard. Tupac créé Thug Life et Tribe Called Quest affine sa recette du jazzrap avec Midnight Marauders. Rick James, lui, est devenu un sacré freak. En 1991, il se fait pincer pour agressions sexuelles. U Can’t Touch This.
— Super Freaks par Rick James (1981)
Snoop, Tupac, Hammer et un cigare.
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Guillaume Malvoisin
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