le cinema
de pointbreak

Du jazz, du rap, de la funk et du cinéma. On adore quand ça cohabite, débat ou fait chambre à part. Voici une sélection de la rédaction où l’image sort du cadre, où la musique se la joue hors-mesure. Complètement subjectif. Jamais chronologique. Mais tout à fait recommandable.

page 1

page 2

Birdman

Les Vacances de Monsieur Hulot

Variety

Superfly

Lalaland

Broken Flowers

L.A. Confidential

The French Connection

Lupin III

Some Like It Hot

Cowboy Bebop

Taxi Driver

Birdman

2014 – Alejandro González Iñárritu
musique d’Antonio Sanchez

Un acteur déchu du cinéma hollywoodien monte la pièce Parlez-moi d’amour d’après une nouvelle de Raymond Carver. C’est bien là notre sujet : L’amour romantique, l’amour amical, l’amour filial, l’amour propre. Le tout gangrené par l’industrie du spectacle. Un long, unique (et faux) plan séquence nous balade entre la scène et les coulisses. On nous trimballe de personnage en personnage, lesquels ondulent sur le fil du réel, tanguent vers la folie, s’emmêlent avec la fiction. Le tout sur les pulsations tachycardiques d’Antonio Sanchez, qui donne le rythme à cette comédie noire. Retour à notre ex-vedette. Lui, il a chuté. Enfin, pas tout à fait, regardez, vous comprendrez.

les vacances
de monsieur hulot

1953 – Jacques Tati
musique de Alain Romans

La petite bourgeoisie parisienne vient se pavaner au bord de la mer. Ambiance coincée, ça parle pas trop fort et ça fait des mondanités. Boom, des gags ! Il arrive, les portes de la belle résidence claquent, la sono envoie une musique dansante, les feux d’artifices explosent. À côté de la plaque, Monsieur Hulot, personnage récurrent de Tati fait ici sa première apparition. Le grand bonhomme avec sa pipe, son chapeau et sa voiture qui pétarade bouscule le conformisme ridicule de la bonne société. C’est drôle. Tati c’est de l’image, Tati c’est du son, surtout du son. Ici on entend un refrain, un seul, partout, tout le temps : dans le générique, sur un électrophone à deux reprises, sifflé par un figurant à vélo. C’est du jazz ? Oui bien sûr, ça étonne, ça déconcerte, ça s’appelle Quel temps fait-il à Paris ? et c’est signé Alain Romans. Entêtant.

Variety

1983 – Bette Gordon
musique de John Lurie

Clair obscur et sex-appeal. C’est Rembrandt pris en flag dans un peepshow new-yorkais, Variety. Film intense, lent, très lent et deep, très deep, Ce deuxième long métrage de Bette Gordon signe la classe du female gaze bien avant son heure médiatique. C’est pas loin du Bookie de Cassavetes, cette déambulation obsessionnelle d’une grande brindille dans le Lower East Side du début des eighties. Mais en moins dark, malgré les pussycats shows et autres porn-devantures qui parsèment les plans d’un film ouvert mais cadré serré. Moins docu glauque sur le sex-bizness à New York, que suite magnifique et imparable sur la naissance d’une pieuvre. Christine déambule, apprend et explose de couleurs au son d’un soundtrack très élégant signé John Lurie, leader alors des Lounge Lizards, pas encore redescendu de sa blague du No Jazz. Sa musique pare Variety d’un genre de moelleux radical, à vous hanter pendant de longues années.

superfly

1972 – Gordon Parks Jr.
musique de Curtis Mayfield

1972. Harlem, le Black Power. Priest, un trafiquant de drogue africain-américain veut faire son dernier coup avant la retraite. Classique. Simple. Acheter de la cocaïne pour la revendre et terminer sa carrière avec un million de dollars. Seulement voilà, il est controlé par un petit lieutenant de police, blanc et corrompu jusqu’à la moelle. Et Superfly de dénoncer l’emprise du blanc sur le noir. Curtis Mayfield au son, va dénoncer, lui, l’esclavagisme moderne, les ravages de la drogues sur la communauté africaine-américaine et le ghetto. Dénonciation plutôt funky et dansante malgré les paroles brutales, comme ici avec Pusherman

lalaland

2016 – Damien Chazelle
musique de Justin Hurwitz

Damien Chazelle met en scène une romance entre Seb et Mia, deux artistes enflammés. Cette histoire n’est autre qu’une lettre d’amour, non pas adressée à ces amoureux mais implicitement dédiée au jazz et au théâtre. Comme Mia, je me suis amourachée de la musique de Seb avant même de le connaitre. Pendant deux petites heures il transmet sa passion du jazz, sa fièvre parvient à transpercer l’écran et à atterrir directement au creux de nos oreilles. Cette B.O. composée par Justin Hurwitz associe jazz et comédie musicale à la perfection. Les couleurs de ses chansons vont de pairs avec celles que l’on peut voir à l’écran : explosives. Les notes uniques du piano parviennent à la fois à vous arracher de votre canapé pour les suivre et réussit aussi à vous arracher quelques larmes.

broken flowers

1959 – Jim Jarmusch
musique de Mulatu Astake & co

Qui refuserait une invitation de Jim Jarmusch à partir en road trip avec un Bill Murray pantouflard et coureur de jupons, qui échoue encore une fois lamentablement dans sa tentative de paraitre complètement apathique ? D’autant plus que le voyage est conduit par le roi de l’éthio-jazz Mulatu Astatke, qui culmine une bande originale plus géniale que géniale. Comment ça, vous n’iriez pas ? Même si on fait un crochet chez Tilda Swinton et Jessica Lange ? Allez. On vous a dit que la bande originale était géniale ?)

L.A. confidential

1997 — Curtis Hanson
musique de Jerry Goldsmith

Du chic, du fric et de la violence, dans la nuit, le crime, la corruption, l’adultère, la drogue, les flics et les flingues, c’est un bon film noir. Hommage au genre avec le flegme des Russel Crow, Kevin Spacey et tous les autres. C’est west coast, comme la B.O. jazz West Coast, une atmosphère feutrée où défile des femmes fatales et des bonhommes aux chaussures bien cirées. On se perd dans ce ballet de crapules délicieuses travaillées par leur égo, leur ambition ou leur sens moral. L.A. 50’s, ambiance fin de soirée, verre de wisky sec, clope, un beau tableau en papier glacé mis en musique par Johnny Mercer, Kay Starr, Lee Wiley, Chet Baker ou encore Gerry Mulligan.

The french
connection

1971 — William Friedkin
musique de Don Ellis

Des poursuites, des bongos claqués et le plan magistral d’un homme qui tombe d’un escalier. Don Ellis en leader d’orchestre imparable, Friedkin en réalisateur expert en violence radicale et jamais consensuelle. Surtout, la paire Popeye et Cloudy. Gene Hackman et Roy Scheider, flicasse désabusée, se cogne à chacun des bords-cadre. Désillusion ? Oui, complète et accompagnée d’un plaisir sûr de voir les culbutes dans un New York jazzé façon seventies. Rapide, tendu et d’une voluptée redoutable.

lupin III
the last job

2010 — Osamu Dezaki
musique de Yuji Ohno

Et si Arsène Lupin avait eu un descendant japonais ? Lupin the Third, ou Edgard la Cambriole, c’est lui. Ce Lupin, à l’instar de son ancêtre, est un gentleman cambrioleur. Il est accompagné d’un as de la gâchette, un bretteur et de sa petite amie espiègle pour accomplir ses magouilles. Ces joyeux lurons échappent aux flics sur le tempo d’un big band bien pêchu, signé Yuji Ohno. Le jazz ici c’est l’insolence et la vitalité du protagoniste dans tous ses plans astucieux et risqués. La classe à la James Bond, mais du côté des méchants.

Some like it hot

1959 – Billy Wilder
musique d’Adolph Deutsch

Avec Marilyn Monroe en vedette, forcément, c’est réussi. Voix aussi douce que du sucre blanc. Accompagnée de sa troupe de jazz, la blonde voluptueuse piège le regard pour ne plus jamais le laisser filer. Le scénar aide un peu aussi. Wilder ne se fait pas prier et s’amuse avec le jazz, les gangsters et les histoires d’amour. Sensual power au max, un brin maso, on a très envie de se faire briser le cœur comme Sugar. “Oh baby, I’m through with love”. C’est hot, c’est beau. Thanks Billy.

Cowboy Bebop

1998 — Shin’ichirō Watanabe
musique de Yoko Kanno & the Seatbelts

Une fois n’est pas coutume, la Terre est dévastée et les hommes ont dû fuir sur d’autres planètes. Spike Spiegel et Jett Black, deux ‘cowboys’ fauchés, traversent l’espace à bord du Bebop et naviguent de primes en primes. Série animée pléthorique, Cowboy Bebop, en bon génie nippon, intègre tous les codes occidentaux du cinoche et de la musique pour les plastiquer avec révérence. Dans l’OST de Yoko Kanno et de ses Seatbelts, comboparfait réuni pour l’occaz, passent les ombres de Tom Waits, de Lalo Schifrin et de John Zorn. Ce petit branleur de Spike a la vie dure mais parfaitement syncopée.

Taxi driver

1976 – Martin Scorsese
musique de Bernard Herrmann

écouter : I Still Can’t Sleep / The Cannot Touch Her (Betsy’s Theme) (1976)

Derrière la cam, Scorsese. Aux commandes de l’orchestre, un expat de chez Hitchcock, Herrmann. Un duo de dingue pour un film urbain et sanglant. Rouge et bleu. La B.O patauge carrément dans le blues. De Niro déambule au volant de son taxi jaune et prémédite de noirs desseins. Faussement serein, troublant mais irrésistible. Ça pue le male gaze et la testo. Pas envie de se mater dans le miroir et de se grogner « you talkin’ to me ?” ? Nous si, un peu. Mindblowing as fuck. 

Share This