Kokoroko, dancing queens and kings
Le Silex reçoit Kokoroko à Auxerre. Concert le vendredi 20 mai à 20h30. On vous livre ici quelques notions-clefs pour se laisser aller en sans modération sur cette musique.
C’est quoi la combine ?
Un groupe. Un groupe qui aura navigué du delta du Nigeria aux brumes de Londres et descendu en live jusqu’à l’étincelle Auxerroise. Kokoroko c’est d’abord un nom invoquant la force. Et, sur le plan sonore, le groupe britannique est plus que digne de ce nom. Cet ensemble, mixant l’afrobeat nigérien au highlife ghanéen, à base de cuivres, joue sur son grand nombre de solistes. Mais, idée géniale, l’énergie collective repousse tout égotrip. La musique instrumentale reste à distance d’un contexte full politique et se pose sur une base mélodique carrément profonde. Style propre au groupe, unique et inédit. Vibrant.
C’est bien ce passe-passe ?
Oui, oui. C’est même très bien. Le mélange des accords précis et des mélodies super fluides fait tout simplement du bien. Prenez Something’s Going On. Si vous aviez oublié que le jazz est fait pour danser, Kokoroko va vous le rappeler gentiment. Le collectif n’a qu’un seul but avoué : inclure, mélanger, et faire danser. Besoin de rien d’autre de faire taper du iep. Ou de vous laisser poser les deux dans la mélasse magique de chaque son de ce combo, dont l’urgence tranquille ne doit rien à la nonchalance, dont l’humanité en fusion va chercher partout où il faudra pour nourrir le son commun. Rock, afro, jazz, blues et tout ce qui vous tombera dans l’oreille sans prévenir.
C’est qui déjà ceux-là ?
Huit musiciens, huit britanniques issus de la diaspora nigérienne. Kokoroko est né avant tout d’un manque. Rien sur la scène londonienne n’évoquait les diasporas dont Sheila Maurice-Grey et Onome Edgeworth ont été nourries. Plus qu’un manque, un besoin. Les deux musiciennes fondent donc Kokoroko en 2014. Pour combler un vide et les spectateurs du new jazz-boom in UK. Suivant pas à pas les pionniers de l’afrobeat et du highlife — hello Fela Kuti, Tony Allen et Ebo Taylor ! — le groupe combine ces influences avec l’héritage du jazz balancé quelques décennies plus tôt par Miles Davis et Freddie Hubbard. Repéré sur We Out Here, compile-album multi-interprètes porté par Brownswood Recordings où Kokoroko apporte un méditatif et lyrique Abusey Jonction, le collectif continue d’affiner sa vision d’un jazz nourri de création et de transcendance. Sans cesser de pousser sur les hanches, avec U Man par exemple. Ensuite, Could We Be More sort une once d’espoir au beau milieu du désespoir provoqué par un Royaume-Uni un peu troublé : confinement, Brexit et autres attentats en séries. 2022, année parfaite pour un premier album.
La stat : 8.9
Beaucoup mieux que la 8.6 pour accompagner ce concert. Un degré au-dessus. L’art de vivre icaunais en plein dans le mille.
Le mot-clé : highlife.
Plus belle l’highlife. Une vie sociale extravagante telle qu’elle est pratiquée par les riches ? Not really, Sir. C’est surtout la rencontre entre les soirées hype et les groupes populaires. Inspirée de la musique trad d’Afrique de l’Ouest et mélangée au jazz, le Highlife se pose en musique hypnotique et dansante. Tony Allen boostera le drumming vers les terres addictives de l’afrobeat porté au feu par Fela Kuti.
Le profil du set :
énergie, danse assurée. On part sur deux mi-temps bien organisées, jeu fluide et possession équitable du ballon. Aucun pénalty ni cartons rouge à prévoir.
La décla :
« Je pense qu’il y a aussi une vraie évolution dans la façon dont les gens perçoivent le jazz. Les gens ont peut-être oublié au fil du temps que le jazz est une musique faite pour danser, au point de ne voir en lui qu’une musique où le spectateur s’assoit et observe. »
Propos de Sheila Maurice-Grey recueillis
par Ghislain Chantepie et Luc Frelon sur FIP
— Kokoroko Live (We Out Here : Online & On Air – 2020) / Photo : © Alexandre Marchi
Le récap :
Kokoroko :
Trompette : Sheila Maurice-Grey
Saxophone : Cassie Kinoshi
Trombone : Richie Seivwright
Basse : Mutale Chashi
Guitare : Oscar Jerome
Claviers : Yohan Kebede
Percussion : Onome Ighamre
Batterie : Ayo Salawu
—
concert : vendredi 20 mai à 20h30
—
Dorian Almeida
—
D’autres articles pourraient
également vous intéresser.
C’est par ici.