Dua Lipa, femme alpha

Dua Lipa © Peggy Sirota for Variety

Dans l’héritage du jazz, il y a deux types de types. Et c’est encore plus vrai quand ces types sont des femmes. Il y a celles qui pensent qu’on peut tricher en imitant. En s’effaçant au profit de styles, d’esthétiques et d’écoles adoubées par des prescripteurs souvent complexés par leur virilité en berne. Et puis, il y a les autres. Celles qui font Pop, qui disent no, qui disent yes, qui disent fuck si ça leur chante. Celles qui imposent des nouvelles règles. Du nouveau ? Oui, avec du vieux, avec des moyens, avec de l’efficace. Ça fait vibrer les enceintes des autos, c’est siffloté sur les chantiers, ça se glisse aussi dans les écouteurs des adolescentes et de leurs frangins. Tubes, charts, hits, milliards de vue, quand c’est Dua Lipa, ça pète les scores, c’est écouté, ça pèse.

Dua Lipa naît en 1995 à Londres. À 14 ans, tentative sur Youtube, Dua reprend les morceaux de ses chanteuses préférées. Ça tape dans l’œil du manager de Lana Del Rey. La chanteuse, à la voix trop grave pour le chef de chœur de son enfance, signe un contrat avec TaP Management. L’écriture du brûlant titre Hotter Than Hell (2016) propulse la future star chez Warner. Dua s’impose dans le petit milieu en balançant une pluie de singles. On l’entend avec le businessman de la musique Sean Paul, sur No lie (2016). New Rules, un autre titre écrase toute concurrence, le sixième de son premier album éponyme (2017). Un titre sur la rupture, sur l’indépendance des femmes. Le jeu du succès est remporté par Lipa. Tant mieux, elle le confesse, elle veut « conquérir le monde ». Ça va se jouer à base de dance crying, le style Dua Lipa, on laisse nos corps s’abandonner à la musique, et nos esprits se lamentent, on pleure. Pour exister dans l’industrie, il faut le riff calibré, la production parfaite, l’image finement polissée. C’est plus de la musique, c’est de la pop, c’est de la production, c’est incarnée pleinement et physiquement. La marque Dua Lipa s’expose et c’est vendeur. Le deuxième album sera le climax.

Côté bio, Dua Lipa naît en 1995 à Londres de parents originaires du Kosovo. C’est là-bas qu’elle retournera en triomphe. Pas si banal, une chanteuse pop venant de cette région, un point de plus niveau singularité. En mode electro pop entêtant, la jeune chanteuse fait confiance à Calvin Harris qui lui confectionne une pépite pour s’installer dans les charts : One Kiss (2018). Disco, dance, synth pop, funk, le second opus tape fort. Future Nostalgia (2020) c’est beaucoup de sucre, un emballage parfait. Une starlette de plus ? Non, on parle de Dua Lipa. « Je ne me définis pas comme une femme alpha. Mais j’ai envie de le ressentir lorsque je chante mes titres. Et j’espère que les gens qui écouteront mes morceaux, le ressentiront aussi», confie-t-elle au journal suisse Le Matin. L’engagement est perceptible sur Boys Will be Boys (2020). Ça parle de mansplaining, de la place des femmes, de la complaisance à l’égard d’une certaine forme de patriarcat. La puissance groove des titres Don’t Start Now (2019) ou Break My Heart (2020) prennent une autre dimension. L’héritage des Madonna, Diana Ross, Whitney Houston infuse la production de la star. Le nouvel empowerment est incarné par Dua Lipa, par Angèle, par Beyoncé, bien sûr. C’est la norme, une norme diffusée par les ondes pop qui touchent le très grand public.


Aurélien Moulinet

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