Marrant de se dire que la veille, dans le même club, valsait un Yéti. Yoann Loustalot et son trio jazz jouait à La Vapeur. Marrant de se demander ce qu’il reste, dans l’air, et d’un soir sur l’autre, d’un concert. Avec une pointe d’ésotérisme de fourreur, on imagine avec joie le choc des ondes douces du trio de Loustalot frictionnée par celles, plus velues, de Pneu. De la fourrure à la fureur, il n’y a qu’une jante. Pneu rassemble son monde, sans traÎner. Mode boiler, on ne jouera pas tant que vous ne nous toucherez pas. On veut sentir le contact, on veut sentir la joie, on veut sentir la sueur. OK Fred. Allons-y alors. Le duo noise et tourangeau la joue minimal, la joue compact, la joue en longue phase rock, à peine interrompue par le sustain des pédales d’effets. De l’effet, Jean Baptiste Geoffroy et Jérôme Vassereau ont l’art et la manière. Le genre de truc très libre qui sent bon le caoutchouc et la dissidence très sonore. Guitare en ruptures versus batterie pléthorique, patterns monstres versus arpège « quasi-free-jazz », lance un coco derrière moi, en pleine montée de joie de vivre et de bière. Comme quoi, quand Pneu dérape, c’est bon, ça cartonne, ça prend la braise à tous les foyers : rock, free, noise. La science des équilibres et du fracas est masterisée sur le bout des doigts. Ecouter Get Old Or Die Tryin (Head Records, fév 2025), pour s’en rendre compte. Pneu est un groupe de rock, donc un peu poseur forcément. Et leurs airs d’impros drama-queen se pare d’une énergie et d’une classe imparables et jouissives, face à une fosse-meilleur-des-mondes où surnagent T-shirt Jean-Claude Vandamme, casquette Yacco très agitée, moustache vélo impeccable, mulet non-binaire. Cette même fosse qui accueillera les terres désolées, parcourues par les petits Suisses de Coilguns. Très puissants, les petits Suisses.